Source de l'article : http://www.sportsante.info/article/le-coureur-pied-brise-ses-muscles
Docteur Stéphane Cascua - Extrait de « Alimentation pour le sportif » - Avril 2005
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La course à pied se révèle très agressive pour la structure musculaire. A chaque foulée, les muscles ont pour mission d’amortir la réception.
Les articulations se fléchissent légèrement et emmènent avec elle les tendons et les membranes entourant les muscles. Pour éviter que les membres inférieurs ne se plient brutalement, les fibres musculaires tirent en contresens sur les enveloppes musculaires. A la jonction, les contraintes sont telles qu’il se produit inévitablement des microlésions détruisant du tissu musculaire. Vous comprenez pourquoi, le coureur de fond doit s’efforcer de choisir des aliments favorisant la reconstruction du muscle.
Il faut réparer les lésions musculaires
Ce travail musculaire de freinage appelé aussi « contraction excentrique » justifie les courbatures survenant un à deux jours après une course prolongée. En effet, dans les heures qui suivent cet exercice, les lésions tissulaires sont nettoyées par les globules blancs, il se produit une inflammation qui ne tarde pas à devenir douloureuse. Voilà qui vous fait prendre conscience que vous avez détruit des fibres musculaires. Les études tissulaires, effectuées sur des prélèvements de muscle à l’arrivée des marathons, montrent un vaste champ de bataille : les fibres sont déchirées, enchevêtrées en tout sens, déjà noyées dans un gonflement d’inflammation. Même lors d’un petit footing, vous provoquez insidieusement de type de microlésions au sein de vos fibres musculaires. Bien sûr, les dégâts sont insuffisants pour provoquer des douleurs. Mais le joggeur doit lui aussi ingérer suffisamment de protéine pour reconstruire sa masse musculaire et progresser !
Les ultra-marathoniens finissent par aimer la viande !
Une étude effectuée lors d’une épreuve d’ultra marathon par étapes se révèle particulièrement significative quant aux besoins naturels des coureurs. Lors de premiers jours, les compétiteurs tentent de respecter les principes traditionnels de l’alimentation du fondeur : ils se gavent de pâte et de riz. Très vite, ils ressentent le besoin de protéines : il s’accorde un peu de viande blanche … Mais, leur organisme en demande plus, au cours des étapes suivantes, les coureurs réclament désormais de la viande rouge … voir du gibier ! Rien d’étonnant : le corps exprime finement ses besoins, les systèmes de régulation ont été informés de la présence de déchets musculaires dans la circulation sanguine. Il oriente l’appétit vers les protéines dans le but de procéder « en urgences » aux réparations indispensables !
Marathon et musculation : même ration
Il a été démontré qu’un marathonien en phase d’entraînement intensif avait besoin d’autant de protéines qu’un sportif de force en période de musculation. Le coureur doit impérativement reconstruire les fibres musculaires déchiquetées à la réception de chaque foulée. Bien sur, le corps de ce sportif réclame aussi beaucoup de féculents pour apporter l’énergie nécessaire à ses longs parcours. Evidemment, le fonctionnement musculaire utilise également énormément de vitamines et de minéraux tels qu’on les trouve dans de nombreux aliments notamment les fruits et les légumes. Vous l’avez compris, il faut que le coureur à pied augmente dans les mêmes proportions l’ensemble des aliments. Voilà qui se montre particulièrement logique : le marathonien ne doit pas se contenter d’engloutir des pâtes … ou même des steaks, il doit conserver une alimentation variée et équilibrée !
LE CYCLISME, C’EST AUSSI DE LA MUSCULATION !
Souvenez-vous, le coureur à pied effectue une contraction de freinage à la réception de chaque foulée. L’enveloppe musculaire est emmenée par l’articulation qui se fléchit et les fibres tirent dans l’autre sens pour ralentir le mouvement. Le muscle se contracte et pourtant il s’allonge ! Ce phénomène particulier porte le nom de « contraction excentrique ». Les tiraillements mécaniques qui s’exercent dans le muscle et sur ses membranes sont responsables de nombreuses microlésions.
En courant ou en pédalant le muscle travaille différemment
Ce mécanisme d’amortissement n’existe pas à vélo. Quand vous appuyez sur les pédales, vos muscles se contractent, tirent sur les membranes musculaires et les tendons puis emmènent l’articulation. Toutes ces structures vont dans le même sens, le muscle se contracte et se raccourcit, il se concentre sur lui-même. On dit que la contraction est « concentrique ». Les contraintes mécaniques imposées à la jonction entre les fibres et l’enveloppe musculaires sont beaucoup plus modérées. Ainsi, il est possible de faire de longue sortie à vélo sans ressentir de courbatures le lendemain. Si vous aviez couru autant vos cuisses seraient particulièrement douloureuses !
Cyclistes : n’oubliez pas les protéines !
Les cyclistes et les coureurs ont, tous deux, besoin de plus de protéine qu’un sédentaire. Les premiers abîment leur muscle à chaque réception de foulée et doivent les réparer. Les seconds, en envoyant de gros braquets, réalisent l’équivalent d’un exercice de musculation sur presse. Leur organisme doit réagir en prenant du volume musculaire pour gagner en force.
Ainsi, vous comprenez pourquoi l’apport en protéines dans ces deux disciplines doit être comparable alors que le volume musculaire des pratiquants est différent. Les coureurs détruisent du muscle… et tente de le réparer : ils ont les cuisses minces. Les cyclistes travaillent souvent en force et construisent du muscle : ils ont des cuisses plus volumineuses.
Les triathlètes pratiquant les deux disciplines présentent souvent une masse musculaire intermédiaire. Les ex-cyclistes voient leurs cuisses s’affiner sous l’effet des agressions mécaniques. Les ex-coureurs prennent de la force et du volume musculaire en poussant sur les pédales. Les adaptes du triathlon doivent, eux aussi, penser à conserver une bonne proportion de protéine dans leur alimentation !
DU FER POUR LES IRONMAN … ET POUR LES AUTRES !
Le fer est indispensable à la performance en endurance !
Il faut du fer pour oxygéner les muscles ! Les globules rouges constituent près de la moitié du volume sanguin. Chacune de ces cellules est un réservoir d’hémoglobine, une substance chargée de transporter l’oxygène des poumons vers les muscles en action. Pareil à un aimant, on trouve au milieu de l’hémoglobine, une particule de fer qui attire l’oxygène. Au niveau des poumons, elle parvient à capter ce gaz précieux. Ce dernier passe la membrane des alvéoles, gagne le sang et se fixe dans l’hémoglobine. Arrivée au muscle, le fer libère l’oxygène qui est littéralement aspiré vers les centrales énergétiques cellulaires appelées « mitochondries».
Lorsque l’organisme manque de fer, il ne parvient pas à produire suffisamment d’hémoglobine. Le nombre de globules rouges diminue dans le sang : c’est l’anémie. Les muscles sont mal oxygénés à l’effort. Ils sont contraints de déclencher les filières produisant de l’énergie en l’absence d’oxygène pour une intensité plus modérée. Ils produisent plus précocement de l’acide lactique. On dit que le « seuil lactique» est plus bas. Alors même que le cœur atteint sa fréquence maximum, les muscles des sportifs victimes d’anémie ont moins d’oxygène à leur disposition. On constate que la VO2max chute nettement.
Tout se passe comme si le carburateur du moteur musculaire était encrassé. Le mélange air / essence se fait mal et produit des résidus de mauvaise combustion. La mécanique chauffe plus rapidement, la zone rouge du compte-tours est plus basse. Même la cylindrée du moteur diminue.
Le dopage à l’EPO, c’est l’inverse de la carence en fer !
Le dopage à l’EPO stimule la production des globules rouges. Il s’associe à de copieuses injections de fer ! Ainsi, à chaque battement cardiaque, le sportif d’endurance dopé parvient à propulser bien plus d’oxygène vers les muscles. Ces derniers produisent bien plus d’énergie, appuient plus fort sur les pédales … et atteignent plus vite le sommet de l’Alpes d’Huez ! Malheureusement, cet état artificiel n’est pas sans inconvénient. Le sang particulièrement riche en globules rouges devient visqueux et collant. Les petits vaisseaux risquent de se boucher notamment la nuit quand la fréquence cardiaque et le débit sanguin diminuent. Voilà qui peut provoquer de graves accidents cardiaques ou cérébraux.
Loin de moi l’idée de vous proposer une telle hérésie comportementale ! Non ! Cet exemple a pour mission de vous mettre en évidence tout l’intérêt du transport de l’oxygène pour optimiser la performance en oxygène. Si je ne vous invite pas du tout à augmenter artificiellement et frauduleusement votre taux de globules rouges, je vous suggère d’éviter d’en manquer ! Pour cela, n’oubliez pas de manger des aliments contenant du fer !
Le fer est indispensable à la performance en « résistance » !
Les globules rouges participent aussi à l’effort intense ! Quand le muscle est contraint à produire de l’énergie alors qu’il manque d’oxygène, il produit de l’acide lactique. L’hémoglobine est capable de fixer et de neutraliser les résidus acides. Elle parvient à « tamponner » cette intoxication et favorise la poursuite de l’exercice ! Alors, les coureurs de 800 mètres, de 400 mètres, les nageurs de 100 mètres, les pratiquants de sports collectifs, tous ces sportifs ont besoin de beaucoup d’hémoglobine. Tous doivent manger suffisamment d’aliments riches en fer !
Le sportif perd du fer pendant l’effort !
Parmi les minéraux contenus dans la sueur ont trouve pas mal de fer ! A chaque foulée, le sportif écrase sa voûte plantaire pleine de globules rouges. Nombres d’entre eux éclatent. L’hémoglobine et le fer passent dans le sang et sont en partie éliminés dans les urines. Le tube digestif du coureur est secoué à chaque foulée et il manque d’oxygène car le sang est préférentiellement orienté vers les muscles en action. L’intestin souffre pendant l’effort et finit par saigner insidieusement. Là encore, des globules rouges et du fer sont perdus. Tous ces mécanismes vous expliquent pourquoi le sportif est particulièrement sujet à la carence en fer !
Perte en fer : Les sportives sont encore plus défavorisées
Pour les femmes, les règles viennent s’ajouter à toutes les pertes en fer d’origine sportive ! Les coureuses de fond sont donc les candidates privilégiées à l’anémie. Parfois, l’athlète féminine s’entraînant intensément voit ses règles disparaître. Même si cette fameuse « aménorrhée » de la sportive de haut niveau réduit le risque de carence en fer, elle se révèle particulièrement dangereuse pour le corps féminin. Elle caractérise un surmenage général. Le stress psychologique et physiologique bloque la sécrétion des hormones ovariennes. Ces dernières ne parviennent plus à stimuler la construction osseuse ou musculaire, elles ne protègent plus les vaisseaux sanguins. La jeune athlète se place dans les conditions d’une ménopause précoce : son os se fragilise et devient ostéoporotique ; les parois de ses artères s’épaississent prématurément.
Pour faire du sang, le corps préfère le fer du muscle !
Il est préférable de choisir des aliments qui contiennent du fer aisément absorbable. L’organisme accepte beaucoup plus aisément du fer qui ressemble à celui du corps humain. Le fer du sang est contenu dans une structure moléculaire géométrique appelée «hème». L’hème accouplé au fer prennent place au centre d’une protéine portant le nom de « globine » : c’est l’hémoglobine. Comme son nom l’indique, cette structure ressemble comme deux gouttes d’eau à la « myoglobine ». Cette dernière permet de stocker d’oxygène dans le muscle. Ainsi, en début d’effort, avant que le cœur ne s’accélère et que les vaisseaux ne s’ouvrent, le muscle peut utiliser quelques particules d’oxygènes. Voilà qui explique la couleur rouge du muscle comparable à celle du sang. Vous comprenez désormais pourquoi, manger de la viande rouge est particulièrement utile pour conserver un taux de globules rouges suffisant !
D’autres aliments contiennent du fer facilement absorbé par l’organisme. Le boudin, bien sûr, puisqu’il s’agit tout simplement de sang mélangé à de la graisse et prisonnier dans des boyaux ! Le foie, aussi, car cet organe stocke le fer sous forme directement utilisable par le corps. Enfin, sachez que les viandes rouges ne se limitent pas au steak ; les plats mijotés de nos grands-mères comme les bourguignons et les pôts au feu se révèlent savoureux et … utiles pour fournir du fer. La cuisson prolongée, mitonnée ou grillée, ne détruit pas ce précieux oligo-élément.
Pour éviter que la particule de fer alimentaire ne rouille et devienne inutilisable dans le corps humain, il est bon de l’ingurgiter avec des antioxydants. Pour assumer cette mission, la vitamine C se montre particulièrement efficace. Alors, vous pouvez boire un jus d’orange avec votre hamburger ou mieux encore prendre une salade de fruits après votre faux filet.
Le fer des végétaux est emprisonné dans le squelette fibreux des plantes. Sa structure chimique ne ressemble pas à celle du corps humain. Il n’est pas bien reconnu et il est difficilement absorbé par notre tube digestif. Heureusement la présence de fer animal dit « hèminique » favorise l’absorption du fer végétal. La tradition a du bon : le petit salé contribue à optimiser l’apport en fer des lentilles qui l’accompagne habituellement.
Le fer contenu dans les médicaments n’est pas du fer héminique. Il ne passe pas bien dans le sang. Une grande partie reste dans le tube digestif. Voilà qui explique les fréquentes intolérances digestives associées à ces traitements. Les selles sont notamment grises … presque « métallisées ».
Vous savez désormais pourquoi toutes les conduites alimentaires excluant la viande ne sont pas adaptées aux sportifs … et encore moins aux sportives ! Etre végétarien est difficilement compatible avec une activité physique assidue … surtout si vous visez la performance.
RATION DE RECUPERATION :
LE CORPS DEMANDE AUSSI DES PROTEINES
Tout au long de l’effort, vous transpirez, votre corps perd de l’eau et des minéraux. Vous brûlez de l’énergie, vous consommez vos réserves musculaires de sucres. En vous hydratant, en vous alimentant de façon adaptée pendant votre activité vous parvenez à compenser un peu les pertes. Cependant à l’arrêt du sport, il est impératif de reconstituer l’ensemble des stocks. Il faut boire abondamment et manger des glucides.
Reconstruire le muscle est l’une des priorités
Cependant, souvenez-vous, à l’occasion de la course et des sauts, de nombreuses fibres musculaires ont été déchiquetées. Après l’effort, il a été démontré que le muscle était avide d’acides aminés. Il parvient aisément à capter ces briques chimiques et les utilise pour reconstruire « en urgences » les protéines des fibres détruites par l’exercice. Ce processus est particulièrement actif dans les heures qui suivent l’effort ; on dit qu’il s’agit d’une « fenêtre métabolique » privilégiée. En clair, si vous ne mangez pas de protéine au cours de cette période, si vous ne mettez à disposition de votre organisme des acides aminés, vous perdez l’occasion de reconstituer votre masse musculaire.
L’époque où il fallait exclure les protéines des rations de récupération est révolue ! Bien sûr, on retrouve dans le sang pas mal de déchets protéïnés d’origine musculaire … mais apporter des acides aminés supplémentaires n’intoxique pas l’organisme. Au contraire, ces derniers stimulent les réparations tissulaires et une bonne hydratation permet l’élimination rénale des substances devenues inutilisables.
Notre cerveau est à l’écoute de nos besoins en protéine.
Une étude a été réalisée dans le but de mettre en évidence les comportements nutritionnels naturels après l’effort. Pour cela, à l’issue d’un exercice d’endurance, des sportifs ne voyaient proposer un large buffet… « genre petit déjeuner à l’hôtel ». Ils devaient se servir en fonction de leurs envies et non pas selon les indications de leur culture diététique. Les chercheurs ont eut la surprise de constater que leurs athlètes se portaient spontanément vers le jambon, les œufs et autres aliments riches en protéines, comme si leurs organismes considéraient comme essentiel de reconstruire les muscles malmenés par l’effort. Il semble que la nature privilégie la réparation des tissus à la restauration des stocks en énergie !
Après l’effort, buvez et mangez sans oublier les protéines
Evidemment, réhydrater un corps asséché par l’effort est une urgence. Bien sûr, la « fenêtre métabolique » favorable à la reconstitution des réserves en sucres existe aussi. Il faut la respecter ! Alors, après le sport, il faut boire sucré juste puis manger des féculents. Cependant, lors du repas suivant, les protéines sont les bienvenues. Il n’est pas obligatoire de se contenter de produits laitiers. Le lait « tamponne » un peu les acides produits à l’exercice mais n’est pas toujours bien toléré sur le plan digestif. Dans ces conditions, le convivial sandwich jambon proposé à l’arrivée de nombreuses compétitions populaires n’est pas forcément une hérésie diététique ! Prendre un steak de bœuf … accompagné de pâtes à la tomate… au repas qui suit l’épreuve apparaît comme un choix judicieux !